Je suis une maison. Une maison à louer, sur l’île de Tortola, aux Îles Vierges britanniques.
Je m'appelle MyALL, c'est comme James Bond, je me présente. All. MyALL. D'accord ?
Je coulais des jours paisibles en surplombant ma plage de sable blanc. J’étais à peine surgie des rêves de mon concepteur, un homme d’affaire suisse. Je m’apprêtais à vivre dans la sérénité construite avec mon cher rêveur. Quand soudain, sans crier gare, l’ouragan Irma a tout dévasté.
Et quand je dis tout… Suivez-moi, que je vous raconte. C’est une histoire incroyable.
L’ouragan Irma est arrivé
Le 30 août 2017, mon concepteur, si cher à mon coeur, m’a laissée seule sur ma plage de Trunk Bay. Avant de fermer la porte, je le vois encore aujourd’hui, comme si c’était hier, se retourner, comme à regret. En fait, à chaque fois, il regrette son départ. Un peu comme s’il avait peur de me perdre. Oui mais moi je ne vais nulle part, je reste ici, bien plantée au-dessus de ma plage…
Oui, sauf que là, il a eu chaud. Et moi, sacrément froid.
Au moment où mon créateur tournait la clé de ma porte d’entrée, Irma, ce terrible ouragan, naissait dans l’Atlantique nord. Il allait être l’ouragan le plus puissant enregistré dans l’Atlantique nord, par la vitesse de ses vents. Brrrr.
Les premières images de l’ouragan
Irma, le chemin de la destruction... l'ouragan du siècle
Je pressentais quelque chose, mais, étant d’un naturel serein et confiant, je ne voulais pas laisser libre court à mon intuition. Pourtant, j’aurais dû écouter mon intuition. On devrait toujours écouter son intuition, d’ailleurs. L’intuition, c’est un indicateur comme un autre. Sauf qu’il est beaucoup plus fiable que les autres…
Mon concepteur, lui, était soudain très inquiet. Comme je suis en quelque sorte son “bébé”, nous sommes liés, lui et moi, par un lien invisible. Alors, mon intuition, là, je ne l’écoutais pas trop. Mais son inquiétude, elle, elle m’inquiétait. Nous sommes lui et moi liés par un lien invisible, le lien de son âme qui m’a choisie et construite.
Et les images n’étaient vraiment pas rassurantes du tout.
L’oeil du cyclone
Bien qu’à des milliers de kilomètres d’ici, mon constructeur se tenait informé d’heure en heure de l’évolution des choses. Et il était totalement effrayé ! Il faut dire qu’il m’avait laissée après avoir accroché ses oeuvres d’art favorites sur mes murs. Lorsqu’il est parti, je brillais de tous mes feux, de toute ma joie d’être parfaite.
Et là, le cataclysme s’approchait de moi, de mes agencements si délicatement construits, de mes décorations si judicieusement choisies, de mon petit caractère si adroitement mis en valeur.
Née en 2014, je risquais de me voir anéantie en 2017 ! Ah non, c’était pas juste.
Mon inventeur en était malade d’inquiétude et moi, je m’apprêtais à rentrer en résistance face aux vents violents, face à la force de la nature qui se déchaînait. Je dois dire que la force qu’il m’a donnée en pensant à moi de toute son âme m’a beaucoup aidée. J’étais boostée par son soutien, par sa solidarité avec mes petits murs fragiles. Bien sûr, je n’étais qu’un fétu de paille face à la puissance des éléments déchaînés.
6 septembre 2017
L'oeil d'Irma au-dessus des Iles Vierges Britanniques le 06.09.2017 à 18h30
C’est le jour malheureux où l’ouragan a passé juste au-dessus de ma tête, enfin je veux dire de mon toit. Vous imaginez ? Tête nue face à l’ouragan le plus puissant de l’Atlantique nord ?
Mon concepteur claquait des dents. Un petit moment, je dois dire que je lui en ai un peu voulu. Pourquoi avait-il voulu m’ériger à cet endroit, sur l’île de Tortola, alors que l’ouragan passait juste là ? Ne pouvait-il pas me laisser à la poussière, plutôt que de s’acharner à me bâtir ?
Très vite, pourtant, j’ai cessé de lui en vouloir. Je sentais qu’il était de tout coeur avec moi. Et puis, face aux éléments naturels, face à la nature, il faut parfois se rendre à l’évidence.
C’est ce que j’ai fait. Combative, mais philosophe, j’ai attendu et, quand les vents violents se sont abattus sur mon toit, lorsque le cyclone m’a entraînée dans sa sarabande destructrice, j’ai bandé mes petits muscles bien solides face au déchaînement de la colère du ciel. Enfin bien solides… Limités, bien sûr, je ne suis rien face à la véritable folie qui régnait sur l’Île.
Et j’ai retenu mon souffle. Comme lui, d’ailleurs, lui mon créateur qui ne respirait plus alors que Google Map indiquait qu’Irma passait au-dessus de mon corps, menaçant de me dévaster comme l’ensemble de l’Île…
Le déchaînement sur l’Île de Tortola
Comment vous expliquer ce que j’ai ressenti lors du passage d’Irma ? Vous, mes chers lecteurs, qui me lisez depuis un moelleux fauteuil, vous connaissez la technologie, les TGV dont on m’a parlé, ces trains grande vitesse qui foncent d’une ville à l’autre…
Les TGV, je vous dis, vous voyez, n’est-ce pas ?
Imaginez donc que deux trains TGV passent à deux centimètres de votre corps. Que vous êtes aspiré dans une spirale incroyable, folle, qui menace de vous emporter dans sa course, dans son déploiement de puissance…
Et encore, il faudrait, pour se rapprocher de la réalité le plus possible, se représenter un autre train cherchant à m’arracher la tête, car passant juste au-dessus de moi. Là, là peut-être, on arriverait à une vision s’approchant du traumatisme que j’ai vécu.
Je m’appelle MyALL, et le 6 septembre 2017, j’ai failli être réduite à plus rien du tout, une poignée de sable, comme un mirage dans le désert…
On est si peu de choses, n’est-ce pas ?
Dévastation sur l’Île
De toutes mes forces, j’ai résisté. Oserais-je vous dire que j’ai prié ? Oui, à ma façon, j’ai prié. Je suis née de la force d’âme d’un homme, alors, pour lui comme pour moi, je voulais rester debout. Rester intègre. Rester vaillante. Rester battante. Pas abattue, au sens propre comme au sens figuré.
Pourtant, après le passage d’Irma, c’était comme après le passage d’Attila, à l’époque des Huns ! Là où passe le cheval d’Attila, l’herbe ne repoussait pas, dit la légende… Hé bien Irma, hélas, cela donnait la même impression !
Au matin du 7 septembre, il n’y avait plus rien. La végétation, d’ordinaire luxuriante, avait disparu. Les maisons, bien au chaud derrière leurs arbres abondants, étaient toutes nues, toutes tristes. Et surtout, totalement démolies. Qui avait perdu son toit, qui avait sa barrière démolie…
Arbres abattus, mines défaites, le 7 septembre a été un triste jour. Un jour se levant sur une profonde désolation, des blessures défigurant le paradis sur terre…
Et moi, moi MyALL ? Vous saurez, avec le prochain article, si et comment j’ai survécu, ce que mon créateur a fait pour me permettre de me remettre… Car oui, je suis remise, et c’est même vraiment incroyable. Je me réjouis de vous raconter ce qui s’est passé le 6 septembre 2017 et les jours qui ont suivi…
A tout bientôt, abonnez-vous à ma newsletter pour tout savoir, pour connaître la suite de cette terrifiante aventure…
Et si vous avez loupé le début de mon histoire, laissez-moi vous la raconter !
MyALL
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